Vous ne regarderez plus jamais les cyprès de la même façon…

 Dans le dictionnaire, le cyprès est défini comme un conifère au feuillage persistant, de forme droite et élancée. La poétesse Louise Michel a écrit au sujet de cet arbre : « Le laurier du poète est souvent un cyprès ». On dit de lui qu’il est l’arbre des cimetières, et ça n’est pas par hasard, car la légende de la naissance de cet arbre est férocement funèbre.

Elle est racontée par Ovide, évidemment, dans le livre X (il y en a quinze) de ses magnifiques métamorphoses. En voici une adaptation courte :

Cyparissus changé en cyprès

« Il y avait dans les champs un grand cerf ; de hautes cornes étendaient largement leur ombre au-dessus de sa tête. Ces cornes resplendissaient d’or et, le long de ses épaules, pendaient des colliers ; ceux-ci étaient ornés de pierres précieuses et étaient suspendus à son cou délicat. Sur son front s’agitait une bulle d’argent tenue par de petites lanières de cuir (…).

Dépourvu de toute crainte et de peur instinctive, il avait l’habitude de fréquenter les maisons des hommes et de tendre son encolure aux caresses de n’importe quelle main inconnue.

Mais entre tous, c’était toi, Cyparissus, qui aimait le plus le cerf ! Tu l’emmenais brouter l’herbe nouvelle ou boire l’eau claire des sources. Tantôt tu entrelaçais des fleurs autour de ses cornes, tantôt, tel un cavalier, installé sur son dos, tu le menais ça et là, guidant sa bouche tendre avec les courroies de cuir.

Un jour d’été à midi, le cerf, fatigué, avait étendu son corps sur la terre couverte de gazon et respirait l’air frais à l’ombre des arbres. Sans le vouloir, le jeune Cyparissus le transperça avec un javelot aiguisé. Quand il vit le cerf mourir de sa blessure, il voulut mourir aussi. L’enfant se mit à gémir et fit cette demande aux dieux : « Permettez-moi de verser des larmes éternelles ».

Bientôt son sang se vide et se transforme en torrents de larmes ; ses membres commencent à se couvrir d’une couleur verte ; ses cheveux qui, tout à l’heure, retombaient sur son front blanc, se dressent, se raidissent et forment une pointe fine qui s’élance vers le ciel. »